Quelle raison absurde pousse l'être humain à refouler ses larmes ? Le chagrin, bien qu'éprouvant, est également une source de libération, parfois agréable. Bon nombre se considèrent faibles s'ils "chialent". Mais vous savez..
Je suis une énorme chialeuse, et alors ?
J'ai grandi persuadée qu'il fallait être solide comme un roc, ne jamais montrer une larme, une once de faiblesses. Merveilleux est ce faux sourire que l'on affiche malgré nos tourments, malgré nos larmes sous-jacentes. Quelle réussite de jouer au clown triste, comme si, être vulnérable était honteux. Honteux pour quoi ? Pour qui ?
Dans ma famille j'étais celle qui se laissait submerger par sa sensibilité, celle qui apprendra des années plus tard qu'elle détient cette hypersensibilité. Différente. Trop. Pas assez. Trop sensible. Pas assez solide. Combien de fois ai-je entendu de la part de mes proches, mes compagnons, mes amis "tu pleures pour ça ?", "putain tu vas pas encore chialer", "arrête de pleurer", "ça ne sert a rien ce que tu fais là". Alors. Je détestais pleurer. Ça me rendait faible. C'est ce que je croyais. À l’époque.
Si je pleure, je ne vaux rien.
Si je pleure, je suis faible.
Si je suis triste, personne ne m'aimera.
Comment font-ils ?
Ils maudissent la sensibilité d'autrui parce qu'ils refoulent la leur.
Aujourd'hui je peux l'affirmer, le plus grand courage est d'oser montrer ses émotions, les plus pures, les plus vraies, les laisser nous submerger. Vivre avec sensibilité c'est ressentir les douleurs, de façon brutale, vivre la tristesse du fond de son âme. Mais il existe l'autre face de cette sensibilité, celle qui permet de vivre avec puissance, créativité, amour, observer avec le cœur les choses qui nous entourent. Souffrir d'un rien mais s'animer pour tout.
Qui nous a fait croire que nous ne serions pas aimables si nous nous montrons vulnérables ?
J'ose croire que d'autres âmes pensent également que la beauté est dans l'authenticité. Vous savez, ces rires francs, ces regards surpris, ces larmes envahissantes, toutes ces expressions, ces émotions perceptibles, celles qui parfois nous trahissent. J'ose penser que je ne suis pas la seule à trouver ça beau, les rires autant que les sanglots. C'est douloureusement tendre de voir une âme à nue, celle qui se rend visible, lisible, parfois à vif, parfois éblouissante.
Je ne suis pas ce roc indestructible, je ne l'ai jamais été.
J'ai tenté en vain de jouer ce rôle, la fille courageuse qui affronte sans jamais s'effondrer, celle qui sourit sans s'arrêter, celle qu'on aime, celle qui rayonne. J'ai essayé, en vain, d'enfermer mes larmes, mes émotions. Mais quoi que nous enfermions, tôt ou tard, l'espace devient trop étroit, puis survient le drame, un trop plein explose au fond de son âme. Incontrôlable. Les émotions parlent à notre place, tout devient disproportionner, inadéquate. C'est bien dans cette explosion dramatique que la carapace se brise, les émotions reprennent leur pouvoir, c'est alors que nous n'avons plus d'autre choix que de les apprendre, les nommer, les ressentir, mais surtout, les vivre.
Hypersensible, tout vivre, bien trop fort, d'un extrême à l'autre.
A ce jour lorsque je pleure, j'essaye de bénir chacune de mes larmes, car elles me rapprochent un peu de plus de ma vraie nature, celle que j'ai étouffée durant tant d'années, celle que l'on a voulu changer. Je vis chaque tristesse comme chaque rire. J'ai le cœur tendre, mais l'âme fragile. La vie m'a faite ainsi, sensible et à vif. Comme il est tentant de fuir, trouver un stratagème afin de ne pas ressentir. La sensibilité est belle, mais parfois, complexe à vivre. La peur d'être malgré tout, la pleureuse de service, celle qui est encore trop, pas assez. Et le cercle est infini.
Si l'on partage facilement nos joies, pourquoi ne pas partager nos peines ? Qui a-t-il de si honteux à avouer la tristesse ?
La sensibilité embellit le cœur de celui qui s'autorise à la ressentir.
En regardant un film, en lisant un livre, un doux message, lors d'une accolade, devant la beauté les nuages, tant de situations ou je me laisse parfois submerger par mes émotions, celles qui font qui je suis, celles qui me rendent humaine, c'est alors que roulent ces larmes bleues. Puis il y a les autres, plus sombres, celles qui irritent la peau lorsqu'elles tombent, celles de la douleur, de cœur qui s'effondre. Ressentir c'est être vivant, vivre ses émotions est une libération.
Si vous voulez guérir, autorisez vous à ressentir.
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