Jeudi, 6h du matin. Je peine à ouvrir les yeux. Et si je me laissais dormir. Qu'ai-je donc à faire de toute manière. La lourdeur de ce corps qui m'empêche de le mettre en action alors, dans ce sommeil je plonge, encore et encore.
Une ombre sombre me colle à la peau, celle qui pèse une tonne, représentant certainement le poids de mon chagrin, de ma résignation. Chacun de mes gestes, de mes pas, me demande un éternel effort. J'aimerais qu'il soit simplement question d'un manque de motivation, malheureusement, cette léthargie survient sans mon approbation. Vide, et pourtant remplie de larmes, ces litres dans lesquelles je me noie, perdant le sens de mon existence.
Pourquoi je me lève ? Pour quelles raisons j'en aurais envie ?
Comment donner un sens à mes journées lorsque l'obscurité enveloppe mes rêves ? Je cherche désespérément une lumière, agir comme ce soleil qui chaque jour fièrement se dresse. Cependant, cette phase devient parfois si accablante qu'il m'arrive de supplier une fin, un répit, un arrêt définitif. La mort, dit-on, un sujet tabou, mais lorsque la douleur est insoutenable, elle apparaît comme le seul espoir. Bien que cela ne reste finalement qu'une pensée, une partie tend alors vers l'autodestruction, puis à cet instant, à chacun son poison.
Les choix sont multiples et bien souvent invisibles.
Fuir cette réalité dévastatrice, même si la vérité réside au fond de l'esprit. Il faudra faire face, il faudra regarder, (s')écouter, laisser aller. Lorsque je retiens au fond de mes tripes, mes émotions s'y logent, c'est ici qu'elles me rongent lorsque vient la nuit. Un rythme de vie secoué par ce mental agité, celui qui ressasse, celui qui amplifie la morosité.
Je réalise alors que bâtir de bonnes habitudes prend du temps, mais les détruire, un seul instant.
Quelque jour, quelque heure, la routine établie devient obsolète, les bonnes manières partent aux oubliettes, et me voilà dans un nouveau cercle, celui de la destruction volontaire. Pendant ces heures, ces jours, ces semaines, je ne suis qu’un faible pourcentage de moi-même. Je me débats comme une acharnée afin d’anesthésier mes souffrances, les parties bien trop à vif, les souvenirs qui me hantent. Elles reviennent souvent ces images, comme ces vieilles paroles résonnant mélodieusement dans mon esprit, c'est alors que je refais le film de ma vie, me demandant comment cela aurait pu être différent. Des suppositions à n’en plus finir, celles qui vous retournent le cœur, vous foutent en l’air. Sacré discours interne !
Sous les nuages se cache toujours le soleil.
Puis, un jour, le diagnostique tombe. Les mots de ma psy résonnent encore : "tu as fait preuve d'énormément de résilience", "n'oublie pas tes progrès", "ne te laisse pas tomber", "tu vis une dépression". Dépression. L'impression de me prendre une claque. Suis-je si faible que ça ? Envisager un traitement m'a replongé dans ces souvenirs, ceux que je ne veux pas revivre, alors, sur le chemin retour, un souffle de courage gagne mon esprit. Dépression. Après un mois d'autodestruction, le temps est venu de passer à la deuxième phase, celle d'enfin vivre ses émotions, cette tristesse que je fuis sans cesse, parler à ces démons qui me guettent. Dépression. Jouer ma dernière carte pour m'en sortir. En ai-je véritablement envie ? Essayer d'aller mieux, de retrouver le goût de vivre. Dépression.
Les sanglots qui déchirent le cœur, la rage qui rougit la peau.
Vivre pleinement la peine, sans fuite, sans se détruire. Accueillir. Vivre consciemment est difficile. Ces émotions envahissantes, cette solitude parfois subit. Ce processus est si lent, si éreintant. Et pourtant, chacun de mes pas, de mes actions misent en place, est une victoire sur celle que j'étais le mois précédent.
"Tu viens juste de recommencer à marcher, attends avant de vouloir faire un marathon !"
Comprenez donc, mollo l'asticot ! Ne pas se laisser dépérir en trouvant l'équilibre, être dans l'action sans se mettre la pression, savoir écouter ses besoins, ses limites, sans retomber dans une complète léthargie. Car la batterie est défaillante, le niveau d'énergie plus faible qu'à l'accoutumée, il faut donc être prudent, prendre soin de soi comme on le ferait pour un ami. Devenir son propre et meilleur accompagnant.
Chacun vivra la dépression à sa façon
Notre perception, notre tolérance, ainsi qu'un tas d'autres facteurs font que, chaque individu vivra ce trouble de par son propre prisme. Mes mots sont en aucun cas une vérité universelle car nous n'avons pas le même fonctionnement et surtout, les mêmes besoins dans ces situations. Ne pas avoir de traitement jusqu'alors est dû à une mauvaise expérience, je ne suis pas anti médicament, bien au contraire, je ne me permettrais jamais de dissuader quiconque de suivre un traitement qu'il considère comme nécessaire (je ne suis clairement pas un exemple à suivre vu le danger dans lequel je me suis mise).
Soit ! Je sais à quel point la douleur est profonde, si profonde qu'on a comme l'impression de se désintégrer de l'intérieur, notre seule envie est que le monde s'arrête de tourner afin de ne plus penser. Ça prendra le temps que ça prendra, pas à pas, avec des petites actions pour commencer. Se lever du lit est une victoire, avoir une hygiène correcte en est une autre, réussir à lire, écrire, ou faire une quelque conque activité est une immense réussite, sortir marcher l'est tout autant. Ne jamais sous-estimer la valeur de ces avancés. Il faut tout (re)découvrir, tout (ré)apprendre, comme un enfant. Il faut (ré)apprendre à vire.
La pensée qui me fait tenir le coup est de me dire que parfois, la vie à besoin d'un nettoyage, tout détruire, semer le chaos, comme pour faire du trie, briser l'ancien pour faire naître le nouveau.
Vous n'êtes pas seul.es mais surtout, à partir du moment vous vous sentez mal qu'importe le degrés, vous êtes légitimes de demander de l'aide, que ce soit avec un professionnel de la santé, les numéros et sites listés ci-dessous, ou vous rendre aux urgences psy de votre ville. Comme dit ma psy "n'attends jamais qu'il soit trop tard".
France
Suicide écoute : 01.45.39.40.00
SOS amitié : 09.72.39.40.50
Association France Dépression : 07.84.96.88.28
Belgique
Télé-accueil : 107
Centre de prévention du suicide : 0800.32.123
Suisse
Pro Juventute (enfant et jeunes) :147
La Main Tendue (adultes) : 143
Prenez soin de vous, vous le méritez ♡
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